Je suis fatiguée

Publié le par josephine

Le froid s’est installé, un froid piquant, tonique, dont nous avions perdu l’habitude. Les fêtes approchent. Je n’ai jamais aimé les réjouissances imposées, celles ci surtout  avec leurs frénésies d’achats et leur débauche de nourriture.

Excès pour certains, pénurie, d’autant plus cruelle, pour d’autres.

Noël. La fin d’un long trimestre. Celui ci plus âpre, frappé d’incertitudes. Ce cynisme sans pareil, cette hâte à détruire. 

Non, dans notre Rased nous ne produisons pas. Face à la loi du profit, la plus value est invisible.

Restaurer la part de l’humain, est-ce côté en Bourse ?


La fatigue est là. Plus qu’à l’ordinaire ? Est ce tout simplement qu'à la fin du trimestre, on  s’autorise davantage à exprimer sa lassitude ?

Alors je suis fatiguée.

Impression de saturer. Un trop plein d’histoires, difficiles, douloureuse, petites chroniques de la violence ordinaire. Comme si l’approche des fêtes accentuait le sentiment d’urgence et rendait la détresse plus prégnante

. « -Les veilles de vacances, c’est toujours là qu’arrivent les pépins » me disait hier un directeur d’école.

Depuis quelque temps, une question me revient avec insistance. Cette fatigue, cette impression de saturation sont elles simples éprouvés, des hôtes transitoires, d’essence purement subjective ou existe t il réellement un seuil, variable, au delà duquel il conviendrait de suspendre sa disponibilité à l’autre. D’abord se protéger, prendre soin de soi.

En effet, si le bien être et la joie sont communicatifs, qu’en est il d’une fréquentation trop assidue avec le malheur du monde ?. Ces mères, épuisées à force d’adversité, qui ont poussé ma porte dans un état de tension extrême et se disaient apaisées lorsque nous nous quittions.

Apaisées ? Que s’est il donc passé ?

Je les ai écoutées, c’était bien peu. Alors quoi ?


« - Les situations, je les porte en moi tu comprends ? » me disait un jour une collègue.

Oui, c’est cela, et il s’agirait de la prendre au pied de la lettre. L’écoute comme métaphore d’une maternité toute particulière où l’on accueillerait l’autre au creux de soi, berçant ses blessures, ravaudant sans cesse les accrocs du temps.

Les paroles très douces d’une chanson d’enfance me reviennent en mémoire :

«  File la laine, file les jours

Berce ma peine et mon amour

Livre d’images, des rêves lourds

Ouvre la page de l’éternel retour »

Chanson de femmes, maternité insue.


« - Mon père a  survécu aux prisons françaises. Mais il n’a jamais parlé de la prison, des tortures. Et bien tu vois, malgré la terreur, notre maison en flammes, la fuite dans la nuit, moi petite fille, sur le dos de grand mère, après tout cela, malgré tout cela, la vie a continué à se transmettre. La cuisine était le lieu de la vie, le lieu de la parole. Les femmes chez moi, endurantes, s’obstinaient. Elles tenaient tête au malheur» me disait un jour Shéhérazade, avec cet accent si particulier. Shéhérazade, quand elle parle, c’est aussi une chanson très douce, une berceuse, après un gros chagrin.

Elle donne envie de fredonner avec elle.

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A
S'il te plait Josephine, continue ton blog. Je suis déçu les jours où je ne trouve pas ton petit texte. Balthazard
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